Extrait - Dragonmark
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L’extrait suivant comme l’ensemble de ceux présents sur ce site internet, a été traduit par l’équipe de Dark-Hunter Francophone en respectant au maximum le texte et la syntaxe de l'auteure.
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[...]
Reconnaissante de ne pas avoir à vivre avec ces énormes égos et cette irritabilité, Edilyn posa le plat à côté de son nouvel ami. A peine avait-elle reculé, que les portes s’ouvraient pour faire entrer leurs invités d’honneur si longtemps attendus.
Le clan dragon.
Ses lèvres se plissèrent involontairement alors qu’ils entraient dans le hall dans leurs vêtements coûteux. Leurs armures de cuir sombre étaient rehaussées d’or et d’argent, qui scintillaient à la lueur du soleil comme s’il se déversait à travers les fenêtres. Plus beaux que n’importe quel humain, ils étaient ici pour le Winnowing – pour choisir le meilleur, le plus noble guerrier de son clan afin qu’il devienne son compagnon dans la guerre.
Et dans la vie.
Supposément, c’était le plus grand honneur d’être choisit par eux. Les hommes et les femmes de son clan se battaient pour cette chance et parlaient peu d’autre chose le reste de l’année. Toute la jeunesse éligible s’entraînait pour ce jour, espérant être parmi ceux pris pour aller vivre avec eux.
C’était la dernière chose qu’elle voulait.
"Pourquoi est-ce que tu trembles autant ?"
La rage. Mais elle ne répondit pas au vieil homme. Elle ne pouvait pas.
"Tu as peur ?
-Nay, dit-elle avec un haussement d’épaules.
-Pas même un peu ?
Elle secoua la tête.
"Pas même un peu," dit-elle en répétant ses mots, "simplement inquiète du fait que je pourrais l’emporter.
-Qu’est-ce que tu veux dire ?
La douleur lacérait son âme face à cette innocente question qui la forçait à se souvenir de choses qu’elle voulait laisser enfouies. Mais était-ce utile ?
Et avant qu’elle ne puisse l’arrêter, la vérité s’échappa de ses lèvres.
"Chaque année j’auditionne pour le brenin1 avec mes compétences, et je suis meilleure que tous les hommes de mon clan.
-Alors quel est le problème ? Pourquoi n’es-tu pas en couple avec un dragon ?
-Je ne veux pas l’être. En fait, je veux que le brenin me choisisse en tant que marchoge2.
-Mais pas pour les dragons ? Pourquoi ?
-Parce qu’elle sait qu’elle leur casserait le dos et les paralyserait, dit Gryffith en passant près d’eux.
Ses amis éclatèrent de rire.
Réprimant une envie de jeter quelque chose à ce con arrogant, Edilyn plissa les yeux vers Gryffith se dissimulant en vain, alors que lui et ses acolytes disparaissaient dans la foule.
Mais elle n’était pas si insensible.
Elle se retourna vers le vieil homme. "Je ne suis pas intéressée par le fait d’être choisie par les dragons. En fait, je ne suis jamais comparu pour le Winnowing. Plus exactement, je me retire avant que ça commence. Je veux voler de mes propres ailes. Mais le brenin me refuse. Chaque année. Il veut seulement des draigogs pour son armée.
Et en parlant de ça, l’appel retentit signalant aux concurrents le moment de se rassembler.
Elle jeta un œil sur son invité. "Avez-vous besoin de quelque chose d’autre avant que je ne les rejoigne ?
-Nay, ma dame. Bonne chance à vous.
-Et à vous, mon seigneur…" Le rouge lui monta aux joues lorsqu’elle réalisa à quel point elle avait été impolie envers lui.
-Je suis désolée, j’ai oublié de vous demander vôtre nom. C’est indélicat de ma part.
-Tu es tout sauf indélicate, chère Edilyn. Appelles moi Emanon.
-Seigneur Emanon. Ça a été un plaisir de vous assister." Elle s’inclina légèrement devant lui, puis courut rejoindre les autres.
Emanon s’assit en silence tout en regardant Edilyn se frayer un chemin dans la foule. Plus grande que la plupart des hommes, elle avait une sorte de beauté exotique qui la distinguait des autres. Ou peut-être était-ce sa joie de vivre. Son exubérance innocente face à leur négativité.
Elle était un phare dans leur tempête monotone.
Il n’avait jamais vu une personne aussi déterminée face à l’adversité. Il se releva, il resta sur le bord extérieur de la foule, ainsi il pouvait regarder sa performance. Telle une bannière d’ébène flottant librement, ses longs cheveux noirs volaient derrière elle alors qu’elle courait prendre sa place aux côtés des autres. Ses joues étaient légèrement rougies par l’effort et sa poitrine généreuse se soulevait et s’abaissait au rythme de son excitation.
Oui, elle avait un corps généreux qui exprimait non seulement un appétit pour la vie, mais aussi une robustesse en toutes choses.
Plusieurs femmes retroussèrent les lèvres ou roulèrent des yeux à son approche.
Elle leur répondit par un sourire et leur souhaita bonne chance avec audace. C’était une jeune fille si insolente et joviale. Habillée d’une tunique orange vif qui lui tombait jusqu’aux pieds, dans laquelle se mêlaient du vert et du bleu qui paraissait pâle ou élimé. Elle avait placé des brindilles dans ses cheveux et était parée d’un casque à cornes. Il se demandait si elle avait voulu ressembler à un lutin ivre, une fleur échevelée… ou a un taureau affaibli qui s’était roulé dans un champ pendant un moment.
Ce qui fit apparaître un sourire assez rare chez lui. S’il pouvait apprécier quelque chose dans la vie, c’était ce degré de défiance face à ceux qui veulent vous nuire.
"Est-ce qu’il est venu avec vous ?
Emanon étrécit son regard vers l’homme le plus près de lui en entendant la voix bourrue du brenin interrogeant Tarius Kattalakis. Rare Katagari Drakos, Tarius était le chef actuel de ce groupe qui venait ici prendre leurs compagnes et compagnons chez les humains. C’était un rituel de printemps qu’ils pratiquaient depuis des décennies et c’était lui qui rendait Emanon malade.
Chaque année, les drakos venaient, regardaient les humains et défiaient le décret des dieux Grecs pour leur peuple en sélectionnant un compagnon, alors qu’ils savaient que seules les Parques elles-mêmes étaient supposées leur assigner leur partenaire à vie. C’était cette sorte d’hybris3 qui avait valu à leur race d’être maudite en premier.
Or les Katagaria Drakos, parce que leur ancêtre, Illarion, était le fils d’Arès, et qu’il avait été biologiquement lié contre sa volonté au prince Arcadien qui était un petit-fils de la déesse Nyx, se croyaient supérieurs à ça.
Imbéciles.
Illarion n’intercéderait jamais en leur faveur pour essayer de les sauver de la colère des dieux. Il n’éprouvait pas plus d'amour pour leur espèce hybride qu’il n’en avait pour l’humanité. A dire vrai, il avait essayé de faire son possible pour que son frère les laisse tous mourir après leur création. La seule raison pour laquelle quelques Were-Hunters4 avaient pu survivre, c’était par la bienveillance de Maxis Dragos. C’était de lui qu’ils devaient chercher à gagner les faveurs.
Pas d’Illarion.
Il était le dragon qui les donnerait volontiers à leurs ennemis, et rirait pendant qu’ils se videraient de leur sang à ses pieds. Le fils d’Arès ne se souciait pas de ces créatures. Ni de leurs races ou de leurs guerres. Il ne se sentait aucune obligation, quelle qu’elle soit, envers eux.
Et n’en aurait jamais.
Brûlez au Tartare, bâtards…
Leur comportement envers Edilyn était exactement la raison pour laquelle Illarion n’avait aucun amour pour l’humanité. Tout le problème avec les êtres humains, c’était qu’ils étaient très rarement humains. Et ceux qui avaient été génétiquement fusionnés avec des animaux étaient encore pires. Au lieu d’être meilleurs, ils avaient sombré dans un tout nouveau niveau de méchanceté.
Emanon serra les dents en commençant à partir pour ne pas avoir à supporter davantage leur vile présence, et là encore son regard se porta sur Edilyn.
Elle frotta le flacon qu’elle portait au bout d’une corde autour de son cou… et sourit, un sourire qui l’enchanta comme jamais il ne l’avait été. Bon sang. Ce sourire le laissait sans voix.
Pire ? Son sang accéléra dans ses veines et déclencha au fond de lui le besoin de goûter ces lèvres. Pour la première fois dans son exceptionnelle longue vie, il désirait vraiment la chair humaine pour autre chose qu’un repas rapide et sanglant.
Il avait faim d’elle.
Par l’Hadès…
Et les hommes devant lui continuaient de parler.
"Nay, il n’est pas ici. Mais ne craint rien. Nous sommes plus que capables de défendre ton village et ton peuple.
-A-t-il reçu mon offre d’épouser ma fille ?
Tarius soupira.
-Ce n’est pas ça. Ils clament qu’il est stérile.
-J’ai entendu dire qu’il était fou, ajouta Bracis, tout comme le premier de notre espèce, il ne pourrait pas gérer la transition de bête à homme. Bien qu’il ait physiquement survécu, il est brisé mentalement.
-C’est dommage."
Le brenin laissa échapper un soupir fatigué.
"Nos ennemis deviennent plus audacieux et plus forts. Nous avons perdu la moitié de nos meilleurs guerriers dans la dernière bataille.
-Et bien, nous sommes là maintenant et nous prendrons soin de vous.
Tarius tourna la tête vers les concurrents.
-Qui est cette vulgaire brune qui est sur le point de gagner ?
-Edilyn ?
-Aye. Elle est là chaque année."
En se moquant, Tarius adressa un petit sourire narquois à Bracis.
"C’est une acharnée, n’est-ce pas ?"
Le brenin secoua la tête.
"Je pense qu’elle espère que l’un de vous la prendra puisque aucun homme parmi les miens ne l’aura.
-Pourquoi ça ?
-C’est une orpheline sans aucun bien. Aucune dot. Pas de famille. Tout ce qu’elle a dans ce monde c’est ce vieil arc de guerre qu’elle porte. Vraiment pathétique.
Et pourtant elle était celle chez qui il y avait plus de bonté que tout le reste. Aux yeux d’Enamon, "pathétique" ne lui correspondait pas.
Pendant qu’il regardait sa course contre les autres, son respect pour elle grandit. Ils faisaient tout ce qu’ils pouvaient pour la faire trébucher, la pousser hors du chemin ou faisaient en sorte de la distraire du but.
Edilyn ne faiblissait pas et ne faisait pas le moindre faux pas. Constante et déterminée, elle courait la tête haute et gardait ses yeux sur l’objectif, sans un regard pour les autres et pour les ruses qu’ils déployaient pour freiner son parcours. Rien ni personne ne pouvait l’arrêter.
Finalement, elle passa la ligne d’arrivée en première. Loin devant les autres.
Ça faisait longtemps qu’il n’avait pas vu un tel courage intrépide. Au lieu de la féliciter de sa performance en dépit de leur comportement, ils la dévisageaient, furieux. Leur haine augmenta à un niveau tel qu’il pouvait la sentir, telle une créature vivante glissant dans l’air autour d’eux. De voir une méchanceté si tangible, les cheveux sur sa nuque se dressèrent. Malgré tout, elle persista, avec une grâce résolue. Elle jeta même un regard vers lui, sourit et lui fit un signe de la main.
Stupéfait par cet acte inattendu, il la regarda bouche bée et sentit un battement des plus étrange dans son estomac. De ceux qui enflammaient sa faim. Il n’avait aucune idée de ce que c’était. Il n’avait jamais éprouvé quelque chose comme ça.
Effaçant la sueur de son front, elle alla récupérer son arc pour la dernière partie des jeux. Il ne manqua rien de la façon dont ses traits exotiques s’adoucirent à l’instant où sa main toucha le bois.
Oui, cet arc lui était très cher.
Elle se mordit adorablement les lèvres, ce qui trahissait son incertitude, elle passa ses doigts gantés contre les gravures de son père comme si elle puisait du réconfort en elles. Puis elle se déplaça face à sa cible et avec précaution, banda son arc. Elle tint l’arc et la flèche vers sa cuisse en attendant patiemment son tour.
Un par un, les archers exécutèrent leurs tirs.
Lorsque ce fut son tour, Edilyn leva ses bras avec une précision maîtrisée venant d’années de pratique. "Tu peux le faire," murmura t’elle si bas qu’il était sûr d’être le seul à l’avoir entendue.
Mais alors qu’elle tirait la corde, l’impensable arriva.
Son arc se brisa en deux. La partie haute tomba sur le sol alors que le bas resta dans son poing serré, retenu par la corde.
"Non !" Les larmes envahirent ses yeux alors qu’elle perdait son dernier lien avec son père.
Impeccablement habillée, Morla ne cacha pas son mépris envers elle.
"C’est dommage. Mais ce n’est pas comme si quelqu’un allait te choisir de toute façon." Puis elle exécuta son tir.
Emanon fit un pas involontaire vers Edilyn avant même qu’il ne le réalise. Pourtant il savait que personne n’aurait pu la réconforter pour ce qu’il venait d’arriver.
Pour ce que cette riche garce avait brutalement et inutilement pris, sans un regard de circonstance ou de compassion.
Morla avait fendu le précieux arc d’Edilyn pour l’écarter de la compétition car elle savait qu’elle manquait de talent pour ça. Parce qu’elle avait été peu disposée à passer des années à acquérir cette compétence. Pas plus qu’elle ne prêtait attention à ce qu’elle volait aux autres. Tout ce qui importait c’était ce qu’elle voulait. Au diable les autres.
Comment pouvait-elle faire ça ?
Soudain, un cri retentit. A peine eut il lieu que la foule autour d’eux éclata, brutalement attaquée. Les soldats jetaient leurs capes à terre, sous couverts de se mêlés ainsi aux convives.
Morla et le reste des humains qui avait été en compétition pour être les compagnons des dragons se dispersèrent. Et dire qu’ils étaient des guerriers. Ça en disait long sur leur loyale bravoure.
La seule qui tint bon fut Edilyn.
S’emparant de l’arc de Morla tombé à terre, elle jeta son carquois sur son dos et commença à viser leurs ennemis. Des ennemis qui avançaient rapidement, s’attaquant aux dragons Kattalakis et au peuple brenin.
Emerveillé et impressionné, Emanon regarda Edilyn protéger courageusement les immondes connards qui avaient été si cruels envers elle. Pourquoi ? Il ne comprenait pas. Personnellement, il les aurait tous laissé brûler. Les seuls qu’il avait toujours protégés étaient ses frères.
Aucun autre ne méritait une seule goutte de son sang.
Ça avait toujours était sa position et sa promesse.
Jusqu’à ce qu’il voit le coup mortel visant le dos d’Edilyn. Une attaque qu’elle ne pouvait pas voir puisqu’elle se concentrait sur les autres menaces. Le temps d’un rapide battement de cœur, il prit une décision qu’il s’était juré de ne jamais prendre.
Avançant brusquement pour sauver une vie humaine, il prit alors sa véritable forme de dragon.
Edilyn se figea lorsque l’énorme et massif dragon l’encercla. Avec son immense tête, il forma un mur d’écailles jaunes et oranges qui cascadaient et brillaient à la lumière du jour. Terrifiée, elle pensa qu’il allait l’attaquer.
Mais plutôt que d’attaquer, il déversa un flot de feu sur ceux qui étaient entrés dans son village. Avec un sifflement féroce, il fit claquer sa queue et baissa ses ailes teintées de noir vers elle. Montes à bord, ma dame Edilyn.
Elle resta bouche bée en reconnaissant la voix profonde qui n’avait plus la cadence d’un vieil homme.
"Emanon ?"
Ses yeux serpentins jaunes s’adoucirent alors qu’il la gratifiait d’un sourire timide.
Illarion, ma dame. Et ce sera un honneur de vous servir.
Note de traduction :
1- Brenin : terme gallois signifiant « roi », dérivé du celtique brigantinos.
2- Marchoges : terme gallois signifiant « femme cavalière » ou « femme chevalier »
3- Hybris : L’hybris, ou aussi hubris, du grec ancien ὕϐρις / húbris), est une notion grecque qui se traduit souvent par « démesure ». C'est un sentiment violent inspiré des passions, particulièrement de l'orgueil. Les Grecs lui opposaient la tempérance et la modération. Dans la Grèce antique, l’hybris était considérée comme un crime.
4- Were-Hunter a été traduit par "Garou" dans la version française des romans.
Texte original © Sherrilyn Kenyon - 2016
Traduction © Dark-Hunter Francophone
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