Extrait - Deadmen Walking
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Deadman's Cross #1 - Deadmen Walking
Chapitre 1
En l'an de Grâce 1716
Jamaïque
“J’ai entendu dire que celui-là est si vil, qu’il se flagellait le cul trois fois par semaine.”
Les yeux ronds, Cameron Amelia Maire éclata de rire en entendant la remarque inattendue qu’elle avait entendue par hasard au dessus des voix bruyantes et la musique de la taverne. Jusqu'à ce qu'elle aperçoit l'homme vers lequel elle était dirigée. Cela lui fit ravaler son rire assez vite.
Sainte mère de Dieu…
Il n’y avait aucun moyen de manquer cette gigantesque masse d’humain mâle avançant dans la salle bondée comme l’incarnation vivante de quelque héros ancien.
Non, pas un héros.
Un dieu païen.
Du haut de son mètre quatre-vingt quinze, il dominait tous les autres dans la pièce, et avait une largeur d'épaule tellement grande qu'il était forcé de se tourner de côté pour passer la porte, et de se pencher pour ne pas se décapiter avec la poutre épaisse et basse. Un exploit qu'il accomplit avec une grâce masculine et d'une démarche orgueilleuse qui démontrait des années d'expérience et son habitude à le faire.
Ce qui lui fit se demander combien de fois lorsqu'il était enfant, il s'était cogner la tête avant qu'il apprenne à instinctivement se baisser comme ça.
Avec un geste rapide de sa grande main, il ôta son tricorne noir et le plaça sous son bras musclé, exposant une épaisse crinière de cheveux blond bouclés laissés libres, qui brillait dans la terne lueur des chandelles. Il avait des traits rudes qui semblaient ciselés dans la pierre – dans des proportions masculines parfaites.
Jamais dans sa vie elle n’avait contemplé son égal en forme, force, ou grâce, mais ce n’était pas seulement son apparence surprenante. Il possédait cette présence brute, impérieuse, qui ne rivalisait qu’avec celle des rois ou des commandants. Un air de noble raffinement qui compensait avec une aura d’intolérance sanguinaire, d’indifférence tranquille, et de pur ennui.
Il était létal, aucun doute là-dessus. Séduisant. Plus que cela, il était une énigme en totale contradictions qui faisait accélérer son cœur bien plus qu'elle ne voudrait l'admettre à quiconque, surtout à elle-même.
Dans un trou purulent d'iniquité inhospitalière et de mal, cet homme régnait tel un empereur suprême. Et tandis que ses deux compagnons étaient vêtus de brocards colorés - comme les autres occupants de la pièce - lui, en une frappante contradiction, portait un manteau de laine noire, une culotte à boutons de cuivre lisse et un banal gilet brun foncé. Même sa chemise de coton et son foulard étaient aussi noirs que ses cheveux et ses bottes. Comme un Quaker... et pourtant son comportement et ses armes disaient qu'il ne partageait pas leur religion ni leurs manières pacifiques.
La seule couleur sur son corps était la garde rouge-sang de sa dague de style barbare. Et un rubis monté sur une chevalière luisait sur son auriculaire, attirant la lumière.
Mais en dépit de sa position féroce, son attitude mortelle, et la main ferme qui restait planté sur la poignée de cette épée, il pouvait facilement passer pour un homme respectable. Même un noble.
Jusqu’à ce qu’on croise ce regard froid, sombre et intelligent qui voyait le plus microscopique détail autour de lui.
Elle pouvait littéralement le sentir évaluer les forces de chaque personne dans la taverne et les trier en fonction de leur faiblesse de caractère et leurs faiblesses physiques…
Aussi bien que leur cercueil.
Il était exactement le type même du mâle nerveux qui faisait qu'elle et Lettice tirent à la courte paille pour entrer dans le Black Swan et voir laquelle d'entre elles iraient attendre toute la nuit à une table.
Et Cameron trichait toujours en s'assurant qu'elle serait la seule à devoir attendre ici. Quelque chose qui dérangeait bien plus sa conscience, mais surtout pour le fait que c'était le père de Lettice qui possédait le Swan, et alors que Nathaniel Harrison gardait la réputation et le bien-être de sa fille, il n'était pas aussi circonspect quand il s'agissait du sien. Surtout lorsqu'il se plaçait contre son besoin de profit. Il vendrait tout à l'exception de sa fille pour cela.
Même sa propre mère, et probablement sa femme pour commencer.
Ne voulant pas y réfléchir, Cameron fit une grimace aux hommes qui flanquaient le nouveau venu. Ses compagnons étaient beaucoup plus le type de pirate ou de corsaire que l'on s'attendrait à trouver dans un endroit aussi sordide. Celui qui se trouvait à sa droite avait une crinière de longs cheveux bruns qu'il portait attachée dans une impeccable queue de cheval, avec une barbe bien coupée, et des yeux d'un bleu si lumineux et gai qu'ils brillaient dans la faible lumière. Chacun des doigts de cet homme portait un anneau orné - sans doute le fruit du pillage d'un navire imprudent qu'il avait attaqué - sinon prit sur un cadavre malheureux. Pourtant, il semblait assez amical.
Alors que de nombreux pirates des Caraïbes avaient tendance à percer leurs lèvres, celui-ci avait choisi de placer un petit anneau en or dans son sourcil gauche, juste à côté de son arcade sourcilière. Son élaboré manteau bordeaux et noir était largement coupé à la taille - la dernière tendance. Et là où le séduisant et dangereux capitaine avait choisi de porter un simple foulard noir, la cravate de ce pirate était d'une soie blanche et fraîche, et garni de couches de décadentes dentelles.
L'homme à sa gauche était habillé d’un manteau de soie bleu paon qui couvrait un gilet couleur or. Un gilet d’une soie si fine qu’il brillait dans la lumière comme de l’eau. Il portait une petite perruque blanche qui cachait la couleur de ses cheveux, mais à en juger par la couleur de sa peau, ses sombres sourcils, et l’insouciante barbe qui parsemait ses joues parfaitement sculptées et la ligne de sa mâchoire, elle aurait parié que ses cheveux étaient aussi sombres que ceux de son capitaine. Mais là où son capitaine avait des yeux noirs charbons, les siens étaient d’un sombre bleu avec des touches noisette.
Pourtant son humeur et sa physionomie n'étaient pas aussi noires et sinistres que celles de son capitaine, il n'était nullement aussi jovial que ses compagnons, aucun des deux. Elle devina en lui le quartier-maître.
Ou un bourreau.
Les trois hommes passèrent devant elle sans même un coup d'œil dans sa direction, lui faisant savoir qu'ils ne la voyaient pas comme une menace quelconque, ce qui était bien pour elle. La dernière chose qu'elle voulait était d'être en froid avec des hommes aussi terrifiants et mortels.
Ils se dirigèrent au fond de la taverne vers une table vide. Le grand garde costaud qui avait dû aller la réserver pour eux inclina la tête, puis alla chercher leurs boissons.
Il revint avec celles-ci si rapidement qu'il avait sans doute établi un record de vitesse pour l'auberge. De ses années de travail dans un tel établissement, elle savait que cela en disait beaucoup de sa crainte envers les trois nouveaux venus, et encore plus sur leurs tempéraments et leurs personnalités. Ces hommes n'aimaient pas attendre, et ils ne voulaient pas être interrompus une fois servis.
Pour la première fois, le courage de Cameron faiblit en voyant ces hommes prendre un siège et commencer une conversation à voix basse.
Qu’est-ce que tu fais, Cam ?
Ce qu’elle était venue faire – parler au Capitaine Devyl Bane et réclamer son aide.
Ce n’était peut-être pas lui.
A quoi pensait-elle ? Il était exactement comme on lui avait décrit. Plus sombre que le péché et plus dangereux que de danser avec le disciple privilégié du diable. Il n’y avait personne d’autre qui pouvait correspondre. La sorcière lui avait dit de chercher un capitaine qui lui couperait le souffle et ne laissait aucun doute dans son esprit qu’il était le fléau du diable lui-même.
Ce qui décrivait parfaitement l’homme qui se tenait entre les deux autres. Personne ne pouvait être plus meurtrier et plus sinistre.
"Bienvenue, gouverneur. Vous voulez un peu de compagnie ?
Cameron grimaça lorsqu’une séduisante prostituée s’installa sur ses genoux. Puisque Cameron était habillée en homme et se faisait passer pour l’un d’eux, la prostituée ignorait qu’elle perdait son temps.
Grinçant des dents, Cameron attrapa la main de la femme avant qu’elle dérive vers une partie de son anatomie qui les scandaliserait toutes les deux. Cameron secoua vivement la tête.
"Quoi ? Tu es muet ?" Elle parvint à toucher le visage de Cameron. "C'est bon, mon amour. On n'a pas avoir besoin de mots pour ce que je fais le mieux, de toute façon. Le fait est que tu obtiendra plus de ton argent si nous ne parlons pas."
Cameron attrapa son poignet et se rappela de durcir sa voix et de la baisser d’une octave.
-Pas intéressé, amour. Tu n’es pas mon type."
Elle jeta un regard significatif vers les trois hommes.
La prostituée rit.
"Ah… j’peux pas dire que je peux te blâmer. Ils sont chacun si beau que tu ne peux rien faire d’autre que brûler d’envie de croquer leur derrière et prier pour que ta mâchoire se bloque." Soupira-t-elle avec un sourire séduisant. "Bonne chance, camarade. Mais comme je l’ai dit, tu n’as aucune chance avec l’un d’eux."
Et sur ce, elle quitta les genoux de Cameron pour chercher un autre, et plus probable client.
Prenant une profonde inspiration, Cameron débattait du bon sens de mener à bien cette mission. Il était évident que les trois hommes ne voulaient pas être abordés par un étranger.
En fait, ils semblaient discuter.
Avec vigueur.
C'est de la folie.
Mais Cameron n'était pas une lâche.
Peut-être un peu ?
Elle repoussa la voix de la raison dans sa tête qui lui disait de courir vers la porte avant qu'ils ne l'étripent. Les Jack n'étaient pas des lâches. Maintenant, vas-y ma fille.
Effrayée et haletante, elle se força à se relever et a traverser la pièce, essayant de dégager une confiance qu'elle ne ressentait certainement pas. Ses jambes tremblaient et de la sueur perlée sur son front et sa lèvre supérieure.
Pendant un instant, elle craignit de s'évanouir.
Tu peux le faire. Ne fais pas demi-tour maintenant. Patrick a besoin de toi. Tu es tout ce qu'il a dans ce monde ...
A l’instant où elle fut près d’eux, ils se turent et trois paires d’yeux la transpercèrent d’un regard malveillant qui elle en était sûre, aurait pu transformer les êtres inférieurs en pierre.
Ou, tout du moins, ils auraient souillé leur pantalon. Le Capitaine Bane prit une gorgée de bière avant de parler d’une voix si profonde, qu’elle se propageait comme le tonnerre dans une baie sombre et orageuse.
-"Je peux vous aider ?
Elle fit un pas nerveux en avant.
L’homme aux cheveux bruns s’empara se son épée et la dirigea vers sa gorge.
-C’est assez près, gamin. Présentes toi.
Elle s’éclaircit la gorge et soutint le regard du capitaine.
-On m’a dit que vous étiez le Capitaine Bane ?
Sans le confirmer, celui dont elle était certaine de l’identité passa son pouce sur sa lèvre inférieur.
-Pourquoi cherchez vous le bon capitaine ?
-On m’a dit qu’il… que vous, plutôt, faisiez partie de ceux qui ont participé au sauvetage du Plate Fleet qui a sombré.
Son compagnon se leva et, avec son épée, la força à reculer.
-Nous ne savons rien de ce dont vous parlez.
Trop tard, elle réalisa qu’ils la prenaient sans doute pour l’un des chasseurs de pirates du roi, qui avait pour mission de traquer les voleurs qui s’en prenaient aux navires échoués et à leurs cargaisons.
-Ce ne pas ce que vous pensez. Mon frère était sur l’un des navires.
Bane tendit la main pour toucher celle de l'homme et le forcer à baisser la pointe de son épée vers le sol.
-Et ?
-On m’a dit qu’il avait coulé avec le navire.
Elle s'étrangla en ravalant ses larmes qui menaçaient de l'accabler. Depuis qu'elle avait entendu parler du sort de son frère, elle avait été incapable d'y faire face. Incapable de respirer. Pas après tout ce qu'ils avaient traversé ensemble.
-S’il vous plait. Je dois savoir la vérité.
L’homme à la perruque parla avec une certaine sympathie dans sa voix.
-Seul un navire s’en est sorti.
-Oui", murmura-t-elle, "Le Griffon. Il n’était pas sur celui-là. Son navire était le San Miguel. Il était le Capitaine… Patrick Jack.
Le regard de Bane s’adoucit.
-Désolée. Le Capitaine ne s’en est pas sorti.
Alors qu’ils commençaient à l’ignorer, elle enragea d'être aussi malmené et s’avança.
-Si ce que vous dites est vrai, alors pouvez-vous m’expliquer ceci ?
Elle jeta le morceau d’objet récupéré du naufrage qui avait été livré à sa porte avec un message de son frère.
Il glissa au travers de la table pour atterrir sous la chandelle devant Bane.
Lui et ses compagnons se figèrent pendant une longue minute alors qu’elle attendait, en retenant son souffle.
C’était une babiole sans valeur qui n’avait aucun sens. Une breloque étrange ayant la forme d'une coupe ornée, avec une paire d'ailes s'élevant au-dessus des rebords, et un pieu avec des rubans qui paraissaient y tomber. Elle était marqué d'une fleur de lis au centre de la coupe. Alors qu'elle était assez jolie, elle n'avait aucune idée de pourquoi son frère lui l'aurait envoyé à elle. Pourquoi il en aurait même prit la peine.
Le capitaine regardait étrangement le collier, mais ne fit aucun geste pour le toucher.
"Est-ce censé signifier quelque chose pour moi ?
Elle haussa les épaules.
"Aucune idée." Lentement, elle s’approcha de la table et sortit le message qui avait été enveloppé et scellé autour de l’objet. "C’est ce qu’il a utilisé pour le contenir et me l’envoyer."
Bane prit le parchemin froissé qu’elle tenait dans sa main et le lu. La lettre était simple et déchirante. Des mots qu’elle avait gravés dans sa mémoire.
Cam,
Pardonnes moi de t’avoir laissée comme je l’ai fait. Tu sais que ma loyauté est envers toi. Toujours. N’écoutes personne. Gardes les yeux sur l’horizon et ceci dans ton giron. Ne dis à personne que tu l’as. Pas même à Lettice. Ne fais confiance à personne.
Je serais toujours à toi,
P.J.
Avec une expression bourrue, Bane le lui rendit. Encore une fois, sans la toucher, ni elle, ni le collier.
-Et donc, quelle est la première chose que vous faites avec ça ?"Se moqua-t-il.
Il avait raison. Elle venait exactement de faire ce que son frère lui avait dit de ne pas faire... Elle l’avait remis à quelqu’un qu’elle ne connaissait pas.
-C’est vrai, mais je dois trouver mon frère, monsieur.
Elle tourna la lettre et indiqua le haut.
-Regardez la date. Des mois après qu’ils aient fait naufrage et qu’il se soit supposément noyé. Pourtant s'il s'est noyé, comment m'a t'il envoyé ceci ?
Une étrange lumière scintilla dans les yeux sombres de Bane. De celle qui les firent paraître presque rouges à la lueur des chandelles. Certainement une illusion d’optique ou quelque chose comme ça.
-Qui vous a dit de venir ici ?
-Une sorcière nommée Menyara. Elle a dit que vous pourriez m’aider à trouver mon frère.
Dans un souffle, il laissa échapper un juron. Il était si grossier et guttural que l'homme à sa gauche se leva prestement et se posta à quelques pas de lui, comme s’il craignait une attaque imminente de quelques sortes de la part de son capitaine.
"Qui est Menyara ?" demanda l’homme
Un tic contracta la mâchoire de Bane.
"Ne poses pas des questions dont tu ne veux pas la réponse, Will. Et prie ton Dieu pour que tu ne rencontres jamais cette garce." Avec une sombre, mortelle grimace, il prit finalement la breloque dans sa main pour l’examiner avec plus d’attention.
Avec une expression indéchiffrable, Bane croise son regard.
"Est-ce qu’elle a vu ça ?
-Non. Seulement la lettre.
-Alors pourquoi vous me la montrez ?
-Je… je ne suis pas sûre.
Il le fit passer plusieurs fois entre ses doigts pendant que Will retournait lentement sur sa chaise.
-A quoi vous pensez, Capitaine ?" demanda celui portant la perruque.
"A tout sortes de bêtises." Il s’arrêta pour croiser le regard curieux de l’homme.
"Je vous la confie, Mr. Meers. Amenez-la sur le bateau.
-Je vous demande pardon ? "Il le fusilla du regard d’un air féroce. "Comment ça “la” ?
Le capitaine fixa son regard sur lui.
-Es-tu plus con qu’un manche à balais, fils ? Notre petite Cameron Jack ici présente est une jeune fille aussi sûrement que je suis la graine bâtarde du diable.
L’ensemble de ses compagnons restèrent bouche bée devant lui, puis elle. Et elle soutint leurs regards effarés sans cligner ou broncher.
-Comment avez-vous su ça ?”
Personne n’avait jamais pu dire qu’elle était une femme lorsqu’elle se déguisait en homme. C’était un subterfuge qu’elle avait toujours utilisé depuis que ses parents les avaient laissés orphelins quand elle était petite fille. Patrick avait insisté pour la préserver de tout mal, et de la garder sous son nez de sorte qu’il puisse la surveiller.
Bane se moqua en rapprochant sa bière.
-Ne jamais essayer de duper le diable, amour. Je vois bien à travers toi. En outre, aucun homme n’a de fesses aussi belles. Si c’était le cas, ça mériterait que je change mes croyances pour certaines choses.
Il prit une grande gorgée, puis inclina la tête vers son compagnon.
-Emmènes-la sur le bateau, Bart.
Bart hésita.
-Vous êtes sûr de ça ?
-Oui et installe la dans les quartiers privés pour le moment. Assures-toi que les autres sachent qu’il faut la laisser tranquille ou ils feront face à ma colère.
Bart le salua.
-Oui, monsieur.
-Et Mr. Meers ?
Il s’arrêta pour le fixer en haussant un sourcil.
-J'attends à mon arrivée sur le bateau trouver la jeune fille aussi vierge qu’après avoir quitté votre compagnie, de même que maintenant où elle se sépare de la mienne.
Bart laissa échapper un grognement irrité.
-Je vous hais, Bane. Vous vivez seulement pour ôter toutes les joies de ma mort, n’est-ce pas ?
Il grogna.
-Prie que cette joie soit la seule chose que je me sois toujours efforcé de t’ôter, mon ami. Le jour qui m’apportera le plus d’amusement que ça est le jour que tu devrais redouter plus que tout.
-Bien noté, et mes testicules sont suffisamment remontés dans mon corps de sorte que ça ne cause carrément aucune menace quelconque pour l’innocente jeune fille dans les habits d'homme.
-Bon gars.
-Eunuque, vous voulez dire.
-Et ainsi tu le resteras si je fais en sorte que ce soit un mal permanent
-Oui, oui, Capitaine.
Terrifiée par la pensée d'être seule avec eux et leur équipage, mais trop désespérée pour laisser sa peur interférer avec son besoin de trouver son frère, Cameron reprit sa lettre et le médaillon, priant sur tout ce qu'elle avait que ce n'était pas une erreur .
Dieu s'Il vous plaît, protégez-moi.
Engourdie par une inquiétude nerveuse, elle hocha la tête, rangea ses possessions, puis suivit le compagnon du capitaine....
Devyl revint s’asseoir pour les regarder partir. Il tourna son regard vers son quartier-maître.
-Quoi ? demanda t’il sèchement à Will.
-Comme je tiens à mes testicules… je vais pas dire un mot, Capitaine. Juste m’asseoir ici, et surveiller mon rhum.
Il le tendit vers lui avant d’en prendre une gorgée.
Devyl renifla de mépris.
-J’espère que tu trouves plus de courage que ça pour le travail qui nous attend.
-Aucune crainte à ce niveau. Je vaux mieux que ça. Mais vous oubliez que je vous ai vu au combat. Et je ne suis ni fou, ni assez ivre pour penser que je peux vous battre. En outre, vous trichez et mordez.
Ces paroles firent apparaître un rare sourire de la part de Devyl. C’était l’une des raisons pour laquelle il avait choisi Will pour être son premier quartier-maître. Contrairement au reste de son équipage, Will était imperturbable et plus téméraire qu’il devrait l’être. Il gardait son sang-froid et son calme même aux moments les plus pénibles. Et il le faisait avec un sens mordant du sarcasme et un humour macabre.
Mais avant tout, Will était aussi courageux qu’on le disait. Un courage modéré seulement par sa capacité à raisonner et à mesurer les mérites de la confrontation.
Oui, William Death était l’un des meilleurs hommes avec qui Devyl ait combattu… Ce serait un honneur de mourir à ses côtés au lieu de la façon dont Devyl avait été éviscéré avant...
"Permission de parler librement, Capitaine ?
Croisant les bras sur sa poitrine, il se pencha en arrière et fixa sur Will un sinistre regard.
-Si tu as les épaules pour ça. Vas-y…
-Je me demande juste de ce qui vous prend d’amener une humaine à bord de notre bateau.
-Est-ce que tu as jeté un œil sur ce que son frère lui a envoyé ?
-La babiole insignifiante ?
-Et tu es celui qui clame être l’homme le plus fidèle et religieux d’entre nous” se moqua Devyl.
-Ce qui veut dire ?
-Cette babiole comme tu le soutiens, Monsieur Death…
“Deeth” corrigea Will en marmonnant. Le fait qu’ils prononcent son nom avec un long "e" par opposition à la façon dont il était écrit avait toujours été sa bête noire. Toutefois la raison pour laquelle son ancêtre avait choisi d'être si hostile soit avec l'orthographe soit avec la prononciation était une énigme.
-“Death” répéta incorrectement Devyl puisqu’il avait toujours été un bâtard grincheux. "Elle vient de l’épée de Saint Michel.
-Lequel ?
Il se rapprocha pour retourner le médaillon d'argent qui pendait à un cordon de cuir que Will avait enroulé autour de son poignet gauche.
-Cette créature ailée qui selon toi te protège et veille sur toi.
-Je ne comprends pas.
-Moi non plus. Mais jusqu’à ce que ce soit le cas, j’ai pensé qu’il serait prudent de l’avoir sous notre garde de peur que quelque chose de mauvais décide d’en faire son dîner.
-Et si ce quelque chose s’avère être un membre de notre équipage ?
Devyl permis à ses yeux de s’éclairer de leur rouge naturel.
-Ils passeront une mauvaise journée, en fait… Mon humeur, cependant, serait grandement améliorée par leur acte de stupidité flagrante qui se traduirait par mon acte de rétorsion naturelle d’une violence extrême et malsaine.
Et en parlant de ça…
Les cheveux derrière sa nuque se dressèrent alors qu’il sentait la main du mal rôder vers la taverne.
Will regarda autour de lui en se renfrognant.
"Vous avez senti ça ?
-Oui. C’est venu à terre comme j'ai dit qu'il le ferait.
Et ça se dirigeait vers le plus grand rassemblement de victimes… comme Devyl l’avait également prévu.
Pendant ce temps, les humains dans la taverne continuaient leurs activités, inconscients du mal qui venait pour eux.
Devyl se leva, avec l’intention de les laisser dans leur ignorance. Mais il était à peine à mi-chemin de la porte qu’elle s’ouvrit, et trois yeux-de-platine entrèrent, sous l’apparence de marins normaux.
Will s’arrêta juste derrière lui.
-Les marins de la flotte abattue ?" murmura t'il à l'oreille de Devyl.
Devyl fit un signe subtil, tout en réfléchissant à la meilleure manière de traiter avec ces bâtards impies venus se régaler sur ces innocents et ramener leurs âmes pour nourrir leur maîtresse. Faire partie des Hellchasers consistait aussi à ne laisser personne savoir que lui ou Will étaient ici pour combattre ces démons.
Malheureusement, les yeux-de-platine n’étaient liés à aucun Code. Ils s’échangèrent un sourire mauvais, puis attaquèrent brutalement, mettant en lambeaux le trio d’humains les plus proches d’eux.
Le chaos éclata alors que les humains tentaient de fuir ou de se mettre à couvert.
Devyl pesta lorsqu’il se retrouva plaqué contre le mur par le raz de marée d’humains terrifiés, hystériques à l’idée d’être pris au piège à l'intérieur par des prédateurs inhumains. Avec leurs pouvoirs préternaturels, les yeux-de-platine avaient scellé la porte de sorte que personne ne pouvait s’échapper.
Ils pensaient festoyer ce soir.
Poussant et grognant sur un homme ivre qui tentait d'atteindre une fenêtre, Will se posta près de lui.
"Qu'est-ce qu'on fait, monsieur ? Je ne peux pas m’approcher d’eux avec la foule.
Devyl retira son manteau puis le tendit à son quartier-maître.
-Ai-je jamais dit combien je déteste le son des hurlements humains ?
-Vraiment ? La rumeur disait que c’était la mélodie que vous appréciez le plus.
Il dégagea de sa manche son lance-flèche, Devyl lui jeta un regard agacé.
-Non, la musique la plus douce à mes oreilles a toujours été le gargouillis d'un ennemi mourant tué à mes pieds lorsqu’il pousse son dernier soupir". Complètement calme, il chargea un petit carreau et le tira directement dans le crâne du premier yeux-de-platine.
La bête tomba en arrière et explosa dans un nuage noir.
Surpris, les deux autres se tournèrent bouche bée vers Devyl. Ils devaient avoir réalisés qui et ce qu’il avait face à eux.
Leurs yeux s’élargirent à l’unisson avant qu’ils ne prennent la forme d’un loup et courent vers la porte.
Mais le pouvoir de Devyl était plus grand que les leurs et il les retenait à l’intérieur. Will sourit.
-Nous avons leur attention, Capitaine.
Dès que les yeux-de-platine réalisèrent qu’ils ne pouvaient pas s’échapper, ils reprirent leurs véritables et hideux corps démoniaques. Et ils se divisèrent en trois créatures de plus pour attaquer.
Will pesta.
-Un point faible ?
-Entre les yeux. Décapitation."Devyl attrapa le premier et lui tordit la tête."Mais ça ne les tuera pas.
-Pardon ?" Will pâlit.
Devyl se débarrassa de deux autres avant de lui faire face.
-Des créatures de vengeance et des toutous. Ce sont des manifestations de l’ombre.
Il en attrapa un quatrième avec son couteau et l’enfonça droit dans son crâne.
-Pour les tuer pour de bon, nous devons trouver les corps qu'ils ont empruntés quand ils ont pris leurs âmes et les détruire.
Will grogna avant de tendre son épée et de se débarrasser de celui qui venait dans son dos.
-Je déteste mon travail, Capitaine."
Devyl acheva le dernier, puis dispersa rapidement l’if, le sel et le jaspe sur le chambranle de la porte, et qui empêcherait plus d’yeux-de-platine de faire entrer plus de proies ici.
Will récupéra le manteau de Devyl et le rejoignit rapidement alors que la foule commençait à réaliser que le danger était passé. Maintenant, ils voulaient des réponses qu’aucun d’entre eux n’était libre de leur donner. Et avant que la foule ne puisse se reprendre et réaliser ce qu'ils avaient vu, Devyl et Will faisaient une sortie rapide.
A l’extérieur de la taverne, la lune était devenue d’un étrange rouge sang, et d’épais nuages dans le ciel, la rendant encore plus sombre.
Tendant le manteau à Devyl, Will grimaça.
-Donc, ce ne sont pas les bêtes que nous cherchions ?
Devyl secoua la tête en remettant son manteau.
-Ce ne sont que des serviteurs.
Will grimaça.
-Au cours derniers mois passés ensemble, j'ai vu des choses incroyables qui semblent avoir été recrachées de l'enfer lui-même. Et je ne peux pas m’empêcher de me demander ce que la Porte Carienne retenait exactement hors de ce monde, si on ne l’a pas encore vu ?
Fixant sa manchette, Devyl croisa son regard inquiet avec un sourire entendu.
-Le plus corrompu, le plus horrible mal qui n’ait jamais jailli du cul flatulent du cosmos.
-Lucifer ?
Il rit et tapa Will dans le dos.
-Nous serions si chanceux. Non, Monsieur Death… ce qui vient de la mer fait passer Lucifer pour un enfant renfrogné et innocent.
Will s’arrêta.
-De quoi il s’agit exactement ?
Devyl s’assombrit en y repensant, alors qu’une vague d’amertume et de fureur le submergeait et le brûlait au cœur de son âme noire et flêtrie.
-Pour faire court, Mr. Death… mon ex-femme."
Texte original © Sherrilyn Kenyon - 2017
Traduction © Dark-Hunter Francophone
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